AU SERVICE DE LA CONSTRUCTION ET DES PATHOLOGIES DU BOIS

En construction, quel bois utiliser et comment le travailler

Quel bois pour quel usage ?
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2 - en matière de stabilité
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A lames de bois déformées

" « Le bois est vivant» parce qu’il «bouge», qu’il «travaille». «Cela le rend si chaleureux»… poète, «suspends ton vol»: matériau hygroscopique, le bois est aussi vivant que l’éponge dans l’évier de ta cuisine! "

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Il est mort et idéalement déjà dans l’arbre dont il est issu. Le bois de cœur (= duramen, bois parfait) utilisé dans la construction ne participe plus aux échanges des nutriments dans l’arbre, son rôle est celui de soutenir l’arbre tandis que l’aubier tant apprécié des insectes et champignons est encore vivant. Nous pouvons en conclure que comme les indiens dans les westerns, un bon bois est un bois mort!

Néanmoins, ne réagissant pas aux variations d’humidité de la même façon dans les trois directions – on parle alors d’un matériau anisotrope, à la différence par exemple des métaux, isotropes – le comportement du bois reste mystérieux pour qui ne connaît pas quelques règles que les «hommes de l’art» habillent d’une terminologie spécifique. Comme souvent, maîtriser le champ lexical suffit à comprendre des phénomènes qui n’ont rien de magique, ni de compliqué pourtant.

Savoir prévoir et calculer les déformations, tels sont les objectifs de cet article.

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Pourquoi certaines pièces de bois issues d’un même arbre, séchées de façon identique et exposées aux mêmes conditions climatiques vont-t-elles se déformer, gercer, se fendre alors que d’autres ne bougent pas ?
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lames-de-platelage
Lames de platelage en chêne de « la Jetée », pont-passerelle du Mont-Saint-Michel
1er prix national de la Construction Bois 2015 dans la rubrique « Bâtiments et Aménagements divers »
1er prix 2015 d’architecture du Groupe Moniteur dans la catégorie « Ouvrages d’art ».
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La façon dont la pièce de bois a été sciée dans la bille de bois (= le mode de débit) va déterminer son aspect et son comportement futur.
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Du schéma ci-dessous, NF P 20-102 précise que si la pièce de bois a sa plus grande face :

- perpendiculaire aux cernes d’accroissement (entre 45° et 90 °), elle sera dite « sur quartier »

- présente un angle inférieur à 45° avec les cernes d’accroissement, elle sera dite « sur faux quartier »

- tangentielle aux cernes d’accroissement, i.e. qu’un même cerne rencontre deux fois la plus grande face, elle sera dite « sur dosse »
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découpe d'une pièce de bois
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On comprendra plus tard pourquoi mais dès à présent, retenons qu’une pièce de bois « sur quartier » se déformera 1.5 à 2 moins sous l’action des variations climatiques qu’une pièce « sur dosse » tandis que dans le sens de la longueur (dans le sens des fibres), les variations dimensionnelles sont négligeables.
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le mode de débit d’une pièce de bois
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Comme vu précédemment, le mode de débit d’une pièce de bois prédestine son comportement face aux variations climatiques mais comment le reconnaître ?

Pour chaque essence de bois, l’aspect des pièces de bois sera radicalement différent en fonction de leur mode de débit. Peigné lorsque le bois est sur quartier et ramagé sur dosse. Le meilleur exemple de bois sur dosse est le contreplaqué : en étant déroulées (à la manière d’un taille crayon cylindrique) les feuilles de placage sont par définition toujours tangentielles aux cernes d’accroissement.
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Bois sur dosse A Bois sur dosse
Bois sur dosse Bois sur dosse
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Ainsi pour du WENGUE, principalement utilisé en parquet et en ébénisterie, on constatera ci-dessous que le mode débit influence considérablement l‘esthétique…
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plans-dosse-quartier-faux-quartier
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Si dans le cas du WENGUE le changement d’aspect des faces est radical, l’observation du bois en bout (encore en colis par exemple) constitue un bon moyen de reconnaître les modes de débit et ce d’autant plus que les cernes annuels sont bien différenciés.
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photo quartier dosse faux quartier
A quartier-faux-quartier-dosse
Une autre façon de reconnaître le mode de débit sur quartier est la maille dès lors que le débit est strictement perpendiculaire aux cernes annuels.

Particulièrement visible sur le chêne, celle-ci permet de reconnaître du chêne sans erreur possible.
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La maille La maille, quès aco ?

Sur un plan anatomique, la maille correspond aux rayons médullaires, c’est-à-dire aux conduits reliant le cœur de l’arbre (la moelle) à l’écorce auxquels s’ajoutent des rayons de second ordre qui ne partent pas de la moelle. Ils ont permis la circulation horizontale des matières nutritives dans le tronc pendant sa croissance et assurent la cohésion des cernes d’accroissement. Très fins chez les résineux, ils peuvent atteindre une épaisseur de 2 mm chez certains feuillus comme le chêne.
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Plus fine mais tout aussi caractéristique sur le Hêtre, associée au critère de couleur, elle permet d’identifier aisément cette essence de bois.

Comme nous l’avons vu, un débit sur quartier garantit que la pièce de bois verra ses déformations limitées et si la maille est apparente, cela signifiera que l’on est sur un débit exactement sur quartier. En terme de variation dimensionnelle, c’est la pièce parfaite, en revanche sur un plan esthétique, cela peut conduire à des déboires et ce d’autant plus que la maille en étant très dense ne « prend pas la céruse ».
bois de Hêtre
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Combien de maîtres d’ouvrage ont refusé de réceptionner leur parquet parce que le poseur avait disposé une lame présentant de la maille juste dans l’entrée de la pièce ? Cela explique également pourquoi dans certains lieux prestigieux, les prescripteurs imposent l’absence de lames présentant de la maille. A défaut, soyez persuasif si pareil cas vous arrive !
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Pourquoi ne pas exiger des pièces de bois débitées sur quartier puisque ce sont les plus stables ?
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Cela est possible et traditionnellement, c’est ce seul type de débit qui est exigé par les luthiers et les tonneliers (merrains de chêne). Très peu productif, ce débit est très cher car il impose de nombreuses manipulations de la bille lors de son sciage.

En construction, il faut faire avec ce que l’on trouve. Mais un bon compagnon saura mettre la lame de platelage débitée pleine dosse en pied de mur exposé à l’est ou au nord, la lame de bardage pleine dosse en tête de mur sous les avancées de toiture et a contrario, les pièces sur quartier aux endroits où l’exposition est maximale.

Savoir reconnaître les modes de débit est donc essentiel.

A ce jour, quelques fournisseurs belges et néo zélandais de lames de platelage effectuent un tri en scierie et proposent une majorité de lames débitées sur quartier et faux-quartier…
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Une pièce de bois débitée sur dosse sera jusqu’à deux fois plus fois plus sensible aux variations d’humidité qu’un débit sur quartier mais certaines essences de bois sont plus stables (moins nerveuses) que d’autres.

Où trouver l’information et quels sont les paramètres à regarder de près ?

- Les coefficients de retrait (et de gonflement)

On réservera le mot dilatation aux variations dimensionnelles du bois sous l’effet de la température, la dilatation étant négligeable comparativement au retrait / gonflement du bois sous l’effet des variations d’humidité. Ce sont ces derniers paramètres qui nous intéressent ici.
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Bardage gonflement A gonflement d'un bardage